La crémation est de plus en plus pratiquée. Mais ce qui reste de nos restes a un devenir : tout comme chez les vivants, il y a ceux qui se posent là et ceux qui se dispersent. Nos élus, toujours habiles avec les urnes, ont pondu une loi en décembre 2008 qui interdit de conserver le contenant de l'ascendant à son domicile. Autant dire que les services des mairies ont intérêt à se préparer à répondre illico à toutes sortes de questions sur la dispersion des cendres. Sans tourner autour du pot, la loi l'autorise "en pleine nature", suffisamment loin des voies de circulation. Bon.
J'ai face à moi une dame chez qui son fils souhaite disperser les cendres de sa femme trop tôt disparue.
"Vous comprenez, ce que je ne veux pas, c'est que ça devienne un lieu de recueillement chez moi...
- Mais vous n'y pourrez rien, dès lors que les cendres auront été dispersées, ce sera un lieu de recueillement.
- Oui, mais si je vends ?"
Euh... je tâche de réfléchir rapidement. Nous sommes bien "en pleine nature" puisque ce sont des champs, la loi ne précise pas la destination du terrain. Soudain j'imagine notre législateur instaurer une servitude de recueillement, qui s'imposerait dans l'acte notarié au nouvel acquéreur... Tâchant de maîtriser le fou-rire, je visualise une carte des servitudes de recueillement, façon saupoudrage, dans le plan local d'urbanisme déjà truffé de servitudes de passage, de périmètres de protection de captage, de zones de développement éolien, de zones de survol des grues (pas les oiseaux), de zones de protection spéciale Natura 2000 pour les grues (les oiseaux), de ZNIEFF, de ZRR... Ajoutons 'une servitude de recueillement et plus une parcelle de terrain ne pourra être vierge de tout zonage. Il faudrait créer une commission pour réfléchir à l'étendue du périmètre, en fonction des vents dominants, et...
"Alors, si je vends ?"