Dûment admonestés par le Trésor Public, nous dûmes mettre fin à cette pratique de photocopies et faire disparaître la caisse noire. Mais comment faire ? "Je ne veux pas le savoir !" nous dit le Trésorier.
"On pourrait se payer un bon resto, non ?
- Ce n'est pas raisonnable, toute la mairie qui règle en espèces, ça va faire louche, même si on va déjeuner dans la commune voisine.
- Ou alors on fait un don à la caisse des écoles ? Au CCAS ?
- Ah oui ? Et ils vont mettre quoi dans leur comptabilité, comme donateur ?
- Bon, y'en a pour combien ? On n'a qu'à se la partager entre nous tous, la caisse noire. Après tout, j'ai bien mis 20 centimes de ma poche un jour où on ne tombait pas juste dans la régie cantine...
- Ah non hein, pas de ça !
- Ben on n'a qu'à la garder en cas de coup dur...
- C'est ça, et si l'argent disparaît un jour, tout le monde soupçonnera tout le monde.
- La meilleure solution consiste à acheter un cadeau pour tout le service, dit un collègue qui jusque là s'était tu. J'ai lu une jurisprudence là-dessus, si le cadeau est collectif, nous ne sommes pas attaquables.
- Oui, mais alors pas trop kitsch, le cadeau, hein ? On connaît vos goûts..."
Voilà pourquoi, depuis ce jour, un tableau de maître trône à l'accueil. Bien en vue, selon le principe où plus on le voit et moins on le voit. La lettre volée, en quelque sorte.
"Quelle belle reproduction !" disent les connaisseurs.
Nous nous regardons en coin. Une reproduction, tu parles...